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«Il faut qu’il y ait un désir de vivre ensemble.» Huit colocataires, une aventure humaine entre âges, cultures et croyances

À Lannion, huit colocataires aux horizons variés ont fait le pari d’une vie commune. Âgés de 20 à 71 ans, ils partagent bien plus qu’un toit : une colocation intergénérationnelle, interculturelle et interreligieuse. Patrick, 62 ans et prêtre à la mission de France et Winael 20 ans, nous racontent leur quotidien et l’expérience unique de cette cohabitation atypique.

À Lannion, le bailleur social Terre d’Armor Habitat sous le feu des critiques d’une partie de ses locataires

Hausse des loyers, mauvaise isolation, manque de considération : le bailleur social costarmoricain est accusé par certains occupants de ses plus de 1600 logements lannionnais de mal entretenir son parc immobilier et de ne pas les considérer correctement. Certains d’entre-eux ont constitué un collectif. La façade de l’immeuble de Marie-Hélène Demange est semblable à celles de tous les autres de son quartier. D’un blanc immaculé, elle n’est habillée que par quelques dizaines de balcons étroits. Ses sept étages ne lui permettent pas de dépasser les bâtiments voisins. Dans le quartier des Fontaines, il y a beaucoup de grands ensembles. Ils accueillent une partie des 1800 logements sociaux que compte la commune. Celui de Marie-Hélène Demange appartient à Terre d’Armor Habitat, comme plus de 90 % du parc social lannionnais. Lire aussi : Lannion-Trégor Communauté : le logement sous pression « J’habite dans cet appartement depuis 2019, explique-t-elle. Chaque année, les loyers augmentent, augmentent, mais rien n’est fait. » Depuis près de six ans, elle est installée aux Fontaines. Depuis presque aussi longtemps, elle critique son bailleur. 7°C en hiver Si la locataire est en colère, c’est parce qu’elle passe ses hivers dans le froid. « Cet hiver, j’ai eu 10°C, glisse-t-elle. Et encore, cette année, ça allait. Une fois j’ai eu 7°C. » En cause, selon elle, la mauvaise isolation de son appartement. Contrairement aux quartiers Ar Santé et Ker Uhel, Les Fontaines n’ont pas connu d’opération de rénovation ces dernières années. Les problèmes de logements y sont donc davantage prégnants. En posant une main sur les montants en bois de sa fenêtre, on sent bien un filet d’air froid continu. « J’ai le vitrage d’origine. Il date des années 60. Des fois, vous voyez les rideaux bouger tout seul. On dirait des petits fantômes, s’amuse presque Marie-Hélène Demange. Alors pas le choix, on s’y fait. On sort les couettes. » Elle désigne un tas de duvets soigneusement pliés sur son canapé. Ici, les locataires n’ont pas la main sur la température dans leur logement. Terre d’Armor Habitat contrôle les radiateurs grâce à un chauffage collectif. En cas de température insuffisante, impossible de monter le thermostat soi-même. « Quand on se dit que ça doit chauffer tout le bâtiment, ce n’est pas adapté. Pour éviter le froid, beaucoup de personnes rajoutent chez elles des radiateurs électriques, mais c’est une double facture. » À trois kilomètres des immeubles de Marie-Hélène Demange, cité Saint-Roch, Terre d’Armor Habitat exploite plusieurs dizaines d’autres logements. Trente bâtisses, soixante logis mitoyens et, là aussi, des problèmes d’isolation. Depuis 2016, Claude Guibert y habite. Le retraité rencontre aussi des problèmes avec « l’isolation sommaire » de sa maison. « Tout le quartier est concerné », explique-t-il. Dès son installation, il souhaite faire des travaux. « On a voulu  refaire l’extérieur. On nous a dit : « Non non, ne le faites pas. On va isoler » », raconte-t-il. Depuis ? Plus rien. « On les a appelés, on a envoyé des lettres recommandées. Ils s’en foutent. On nous répond : « C’est en cours, c’est en cours ». C’est en cours depuis huit ans. Moi je veux bien, mais on a du mal à y croire », se désole l’occupant. Devant son insistance, le bailleur social effectue trois diagnostics de performance énergétique (DPE). Résultat : D. « Ce sont des constructions des années 70 avec les prérogatives de 1970. Le résultat des DPE est D. Ces logements sont en D », explique Sandrine Burel, adjointe à la responsable d’agence du Trégor. « Pour moi, c’est des DPE bidons, réagit Claude Guibert. Je suis plus bas que ça. Ces maisons ne sont pas de toute jeunesse. Il faut arrêter, ce n’est pas possible. » « On nous disait qu’on était D, abonde Marie-Hélène Demange. Mais non, on est F ou G. » À l’appui, un bilan de son logement effectué par une entreprise indépendante. Pour protester contre le bailleur social, un collectif a été monté début 2023 pour faire remonter toutes les problématiques des habitants. « On a payé une entreprise pour faire un nouveau DPE », explique Carine Weber, membre du collectif et ex-candidate pour le Parti des Travailleurs aux élections municipales 2020 et aux élections européennes 2024. Nous avons pu consulter ce bilan qui fait chuter la note de l’appartement de Marie-Hélène Demange. Il passe de D à F et devient une passoire énergétique. « Quand on leur a opposé ça, ils ont accusé notre diagnostiqueur de mentir. Nous, on ne le connaissait pas. On l’a juste payé pour qu’il vienne faire le DPE », défend Carine Weber. Des hausses de loyers qui ne passent pas En parallèle des problèmes d’isolation, Marie-Hélène Demange et le collectif sont indignés par les hausses de loyer de ces dernières années. Le loyer et les charges de la locataire augmentent tous les ans. Cumulés, ils sont passés de 460€ à son installation en 2019 à presque 580€ en janvier 2025. Une augmentation de ses dépenses de 120€ tous les mois. « C’est énorme », lâche-t-elle, dépitée. « S’ils veulent louer en l’état, il faut diminuer les loyers », glisse Claude Guibert. Carine Weber précise les doléances du collectif : « Ce qu’on demande, dans la mesure où les travaux d’isolation ne sont pas faits, c’est qu’ils n’augmentent pas les charges de chauffage. On a tout une population qui a des petits revenus qui se retrouve à payer 100 euros par mois pour payer le chauffage mais il fait froid. Ils ont plus que doublé le prix du chauffage. » « On applique ce que la réglementation nous autorise », répond Sandrine Burel, adjointe à la responsable de l’agence du Trégor. « Cette année, le conseil d’administration a décidé d’appliquer le maximum ». Au 1er janvier 2025, les loyers de l’ensemble du parc de Terre d’Armor Habitat ont ainsi augmenté de 3,26%. « Il faut savoir que l’État a réduit les montants des APL pour les locataires des logements sociaux et a demandé aux bailleurs sociaux de compenser cette perte pour les locataires, poursuit

« Je vis sur un bateau ». À Perros-Guirec, Annie Cottet a choisi un logement atypique

Annie Cottet et son chien, Loulou, vivent l’été sur un bateau dans le port de Perros-Guirec (Côtes d’Armor). Un choix de vie original, « euphorisant », selon celle qui travaille à la cafétéria de l’IUT de Lannion. « Je vais avoir 60 ans et j’ai décidé de changer de vie au niveau de l’habitation ». Il y a trois ans, Annie Cottet achète un bateau construit en 1970 pour y vivre avec son chien, Loulou. Le Ty Louann, appelé ainsi grâce à la fusion de leurs noms, est installé dans le port de Perros-Guirec (Côtes d’Armor). Il devient une maison flottante sur laquelle tous les deux viennent passer leurs étés. « Le système des loyers ne me convient pas. Comme j’étais fan de bateaux, j’en ai acheté un », indique Annie Cottet. Depuis son installation, celle qui travaille à la cafétéria de l’IUT de Lannion, a entrepris plusieurs rénovations. Le bateau de 9,50 mètres de longueur comprend deux cabines, l’une servant de chambre et l’autre de débarras, une salle de bain, une petite cuisine et un salon. « Là tu es debout, tu peux vivre. C’est comme un petit studio. Tu as une vraie pièce. On peut y manger à quatre ou cinq ». Une redevance annuelle de 2100 euros à la capitainerie garantit l’accès à l’eau, au Wi-Fi et à l’électricité. Elle doit également s’y rendre afin de se doucher. Une traversée de l’Atlantique Entre Annie Cottet et l’océan Atlantique dans lequel mouille son bateau, c’est une longue histoire. « Je rêvais un jour de traverser l’Atlantique. Je voulais être un jour au milieu de l’océan, savoir quelle sensation ça faisait. Grâce à un ami, j’ai réalisé mon rêve », explique-t-elle. En 1999, elle réalise cette traversée à bord d’un catamaran et passe plus de 20 jours sans poser le pied sur la terre ferme. Pourquoi l’Atlantique ? Cela importe peu. « Ce n’est pas le fait d’arriver qui est important, c’est le trajet qu’on prend. Traverser l’Atlantique en bateau ou en avion, au final on arrive au même endroit. C’est la façon dont on le fait qui a de l’importance. Comme la vie », glisse Annie Cottet. Après sa traversée, Annie Cottet décide qu’un jour, elle s’achètera un bateau. C’est chose faite aujourd’hui. Elle affirme qu’elle pense être à l’âge idéal pour faire ce changement, car elle ressent moins le besoin des choses matérielles. « Ce n’est pas comme quand j’avais 20, 30 ans ou 40 ans et que j’avais l’impression qu’il fallait que j’aie tous mes objets », explique-t-elle. « C’est une déconnexion totale » La quinquagénaire apprécie le fait de vivre dans le port. « Tu es au milieu de l’eau, c’est euphorisant. Tu as l’impression d’être en vacances, confie Annie Cottet. Même là, quand je viens l’après-midi, j’ai l’impression d’être en vacances. C’est une déconnexion totale ». Elle apprécie surtout l’autonomie que ce nouveau mode de logement lui offre. « C’est une forme de liberté. Même si je n’ai pas le permis bateau, je sais que je peux prendre un skipper et un pilote et qu’il m’emmènera où je veux, avance-t-elle. Demain, si mes voisins ne me plaisent pas, je déménage. Si le port de Perros ne me plaît plus, je m’en vais. C’est ça le plus gros de ma liberté. » Annie Cottet n’a pas encore de certitude quant à son avenir. Elle habitera pleinement sur son bateau à partir du mois de mai 2025. « J’ai encore d’autres projets. Peut-être qu’un jour, il finira par être posé sur un terrain et que j’y habiterais. Je n’en sais rien. Qui sait ? Il sera au sec, au moins », sourit Annie Cottet. 🎧 Pour en savoir plus, n’hésitez pas à jeter une oreille à ce podcast de Lola Renaudat et Louis Pin. Retrouvez tous nos articles sur le logement sur notre page web : ÉTAT DES LIEUX

Lannion-Trégor Communauté : le logement sous pression

Avec ses 57 communes et plus de 100 000 habitants, Lannion-Trégor Communauté (LTC) fait face à une crise du logement exacerbée par la pression touristique et le poids des résidences secondaires. Entre objectifs de logements sociaux non atteints et attractivité du littoral, ce territoire breton illustre les défis d’un équilibre fragile entre développement local et contraintes nationales.

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